L’écrivain ivoirien Serge Bilé exprime ses préoccupations face à la réapparition du discours d’exclusion en Côte d’Ivoire, à l’approche de l’élection présidentielle, vingt-trois ans après la rébellion de 2002.
À sept mois du scrutin de 2025, son analyse politique prend une tournure particulière. Dans une publication partagée sur sa page Facebook ce lundi 24 mars 2025, Serge Bilé interroge l’héritage de la rébellion et l’évolution du climat sociopolitique du pays. Il déplore la persistance de divisions qui, selon lui, n’ont pas été résorbées malgré le temps écoulé.
« À quoi a servi ce carnage, si c’est pour revivre, vingt-trois ans après, les mêmes discours d’exclusion, les mêmes haines recuites, les mêmes mensonges éhontés, les mêmes invectives xénophobes entre Ivoiriens ? », se questionne-t-il, appelant ainsi à une réflexion collective.
Son analyse retrace les tensions entre les grandes figures politiques ivoiriennes des trois dernières décennies, notamment les frictions entre Henri Konan Bédié, récemment décédé, et Alassane Ouattara, qui remontent à la succession de Houphouët-Boigny en 1993. Il rappelle que « Henri Konan Bédié (paix à son âme) a ouvertement reproché à Alassane Ouattara d’avoir manœuvré avec Philippe Yacé pour l’empêcher de succéder au président Félix Houphouët-Boigny ».
Serge Bilé adresse également une critique à l’ensemble de la classe politique : « Étonnant peuple guidé par des politiciens qui, somme toute, sont à son image. Si leurs qualités d’hommes d’État sont incontestables, il est indéniable qu’ils se sont souvent égarés dans des querelles qui perdurent depuis plus de 30 ans. » a-t-il déclaré.
Il se penche aussi sur l’impact de ces divisions sur les jeunes générations, rappelant que la majorité des jeunes Ivoiriens n’étaient pas nés lors du déclenchement de ce qu’il qualifie de « guerre des trois ». Il craint que l’avenir de cette jeunesse soit compromis par des conflits hérités du passé. « C’est le bout du bout de tout cela que l’on paie encore aujourd’hui, au risque d’hypothéquer l’avenir de tous ces jeunes Ivoiriens », avertit-il, avant de conclure en appelant à un nouveau départ.
Dans un pays où la politique semble marquée par la recherche constante de réconciliation, il plaide pour une remise à zéro des compteurs : « Dans un pays où personne n’est politiquement irréprochable et où tout le monde a facilement le mot ‘pardon’ à la bouche, il faudra bien qu’un jour on remette les compteurs à zéro. », a-t-il conclu.
À l’approche de l’élection présidentielle de 2025, l’analyse de Serge Bilé soulève une question essentielle : le système politique ivoirien sera-t-il capable de dépasser ces clivages historiques pour répondre aux aspirations des nouvelles générations ?
K.A